La comptabilité carbone s'est imposée comme une pratique pour les entreprises engagées dans une démarche climat

Réaliser un bilan des émissions de GES devient un prérequis pour structurer une stratégie de réduction crédible et répondre aux attentes des parties prenantes

Nos experts décryptent comment la comptabilité carbone permet de passer à un pilotage dynamiques des émissions de GES

Depuis une quinzaine d’années, la comptabilité carbone s’est imposée comme une pratique structurante pour les entreprises engagées dans une démarche climat. Si les premières obligations réglementaires ont servi de déclencheur — en particulier le décret BEGES en France ou les attentes croissantes du reporting extra-financier — la majorité des entreprises ne se contentent plus aujourd’hui d’un simple exercice de conformité. Réaliser un bilan des émissions de gaz à effet de serre (GES) devient un prérequis pour structurer une stratégie de réduction crédible, évaluer ses risques de transition et répondre aux attentes de ses parties prenantes. 

Cependant, malgré une maturité croissante sur le sujet, de nombreuses entreprises peinent encore à transformer ce diagnostic en outil véritablement opérationnel. Les méthodologies classiques (Bilan Carbone®, GHG Protocol) offrent des cadres robustes, mais produisent souvent des résultats peu lisibles pour les opérationnels et difficilement exploitables dans la conduite du changement. 

C’est dans ce contexte que la comptabilité carbone analytique prend tout son sens: en réconciliant les enjeux climatiques avec les réalités économiques et organisationnelles de l’entreprise, la comptabilité carbone permet de passer d’un exercice statique à un pilotage dynamique des émissions de GES. 

 

Qu’est-ce que la comptabilité carbone analytique ?

La comptabilité carbone analytique consiste à ventiler les émissions de GES de manière fine et structurée selon des axes pertinents pour l’action : par site, service, unité de production, produit, client, processus ou zone géographique. Elle vise à rendre le signal carbone lisible, appropriable et surtout actionnable à l’échelle des décideurs internes(1)

Elle s’inspire directement des principes de la comptabilité analytique en gestion financière, en cherchant à relier les flux d’émissions à des objets de gestion identifiables. Il ne s’agit plus uniquement de mesurer combien l’entreprise émet, mais où et comment elle émet, afin d’identifier précisément les leviers de réduction disponibles. 

Cette approche repose sur un principe fondamental : la bonne granularité est celle qui permet de mesurer l’impact des actions mises en œuvre. En d’autres termes, l’objectif n’est pas d’obtenir une précision maximale, mais de concentrer la collecte de données là où elle est pertinente. Pour les postes les plus significatifs, un niveau de détail élevé est requis ; pour d’autres, des ordres de grandeur suffisent. 

En cela, la comptabilité carbone analytique rompt avec une vision "totémique" du bilan carbone - souvent perçu comme un chiffre à produire une fois par an - pour en faire un instrument d’aide à la décision continue. 

 

Comptabilité carbone analytique : levier stratégique de la décarbonation

L’objectif de la comptabilité carbone ne se limite pas à mesurer, mais vise aussi à :  

  • transformer les comportements ;
  • orienter les décisions;  
  • aligner les ressources sur une trajectoire de réduction.  
     

La comptabilité carbone analytique est un catalyseur de cette transformation. 

En traduisant les émissions en unités compréhensibles pour les métiers (ex. : émissions par tonne produite, par kilomètre parcouru, par client ou par projet), elle facilite leur appropriation par les acteurs en capacité d’agir. Elle devient un langage commun entre les fonctions environnement, achats, logistique, production ou finance. 

Elle permet également de mieux cibler les actions :  

  • prioriser les postes les plus émissifs;
  • identifier les opportunités d’optimisation;
  • mesurer l’efficacité des actions mises en œuvre.
     

Par exemple:
 dans une entreprise industrielle, une analyse des émissions par ligne de production peut révéler des marges de progrès insoupçonnées ; 
dans une entreprise de services, une ventilation par type de mission ou de client peut guider des choix stratégiques. 


Enfin, elle favorise l’implication des équipes. Là où un bilan global reste souvent abstrait, la comptabilité analytique permet à chaque direction, à chaque équipe, de comprendre sa contribution et de piloter ses efforts dans une logique de responsabilité partagée.

 

Comptabilités financière et carbone : vers un pilotage intégré  

La construction d’une comptabilité carbone robuste et utile ne peut faire l’impasse sur les apports de la comptabilité financière. Comme cette dernière, la comptabilité carbone suppose des règles partagées, des conventions claires, un système de collecte fiable et des processus d’audit et de vérification. Elle fait appel aux mêmes qualités : rigueur, traçabilité, comparabilité. 

L’expérience de la comptabilité financière, longtemps stabilisée par l’élaboration de normes (comme le Plan Comptable Général ou les IFRS), peut offrir un socle méthodologique précieux pour structurer la comptabilité carbone. De nombreux parallèles peuvent être établis :

  • structuration des postes;  
  • choix des périmètres;  
  • traitement des incertitudes;  
  • gestion des agrégations
     


Les professionnels de la finance et de la comptabilité ont ainsi un rôle majeur à jouer dans cette dynamique. Leur maîtrise des données, des systèmes d’information et des processus de reporting en fait des alliés naturels de la fonction RSE ou climat. À condition d’être formés aux enjeux environnementaux, ils peuvent contribuer à fiabiliser et institutionnaliser cette nouvelle comptabilité. 

 

Certaines initiatives, notamment en cabinet d’expertise comptable, commencent déjà à intégrer des modules carbone dans leur accompagnement. Cela ouvre la voie à une hybridation des compétences, essentielle pour massifier et professionnaliser la comptabilité carbone dans les années à venir(2).

 

 

Pourquoi les entreprises doivent-elles dès maintenant s’appuyer sur la comptabilité carbone analytique ? Puisqu’elle constitue une avancée majeure dans la capacité des entreprises à piloter leur transition climatique. En dépassant la logique du reporting unique, elle permet de structurer une véritable stratégie de décarbonation, ancrée dans les processus métiers et les arbitrages économiques. 

Encore émergente, cette approche appelle à des investissements en compétences, en outils et en gouvernance. Mais les entreprises qui s’y engagent dès aujourd’hui se dotent d’un avantage concurrentiel certain : elles construisent une performance climat crédible, mesurable et pilotable. 

Alors que les contraintes réglementaires et les attentes sociétales s’intensifient, compter pour agir ne suffit plus.  La comptabilité carbone analytique s’impose ainsi comme un standard incontournable pour piloter efficacement les trajectoires de décarbonation des entreprises 

Avec l'augmentation de la réglementation extra-financière, les entreprises sont également confrontées à des enjeux de transparence et de mesure objective sortant du "greenwashing", pour valoriser objectivement leur performance extra-financière auprès de l'ensemble de leurs parties prenantes.  Nos experts vous accompagnent face à ces enjeux.

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