Contexte & Définition
Depuis 2020, l’Administration fédérale des contributions (AFC) a élargi la portée de la transposition internationale en introduisant la notion de transposition internationale étendue. Cette nouvelle pratique administrative vise des cas spécifiques dans lesquels une structuration aboutit à une atteinte injustifiée au substrat fiscal suisse.
La transposition internationale étendue s’applique notamment aux acquisitions de sociétés suisses par des véhicules d’acquisition suisses hors du groupe.
Sous la notion de « transposition internationale étendue », l’AFC inclut les situations dans lesquelles la base de l’impôt anticipé est transférée vers une zone exonérée dudit impôt, lors d’une vente d’une société suisse à un acquéreur n’ayant pas droit au remboursement intégral de l’impôt anticipé.
Dans ce cadre, l’AFC refuse le remboursement de l’impôt anticipé ou l’application de la procédure de déclaration pour les distributions effectuées par une société suisse, dans la mesure où la société d’acquisition suisse est en mesure de distribuer, sans retenue d’impôt anticipé, des réserves à un acquéreur qui ne peut pas en demander le remboursement.
Il ne s’agit pas d’une règle appliquée systématiquement, mais d’un outil que l’AFC se réserve d’appliquer dans des cas particuliers d’abus, lorsque le remboursement de l’impôt anticipé permettrait de contourner la logique de l’imposition. En d’autres termes, un montage ne sera requalifié que s’il aboutit à une économie fiscale contraire à la loi (article 21 al. 2 de la loi sur l’impôt anticipé (LIA)). Cela dit, il peut parfois être difficile pour le contribuable d’apporter les preuves nécessaires permettant à l’administration de ne pas qualifier la transaction de transposition internationale étendue.
Quelles sont les caractéristiques et conditions ?
- Il s’agit de l’acquisition indirecte d’actions d’une société suisse par une personne (physique ou morale), résidant à l’étranger, qui n’aurait, en principe, pas droit au remboursement intégral de l’impôt anticipé.
- Cette acquisition est réalisée via un véhicule d’acquisition suisse (société intermédiaire), financé par des dettes ou par des fonds propres sous forme de réserves issues d’un apport en capital (RIAC) ou sous forme de capital-actions.
- Les fonds (dette ou apport) proviennent généralement d’une société étrangère du groupe du véhicule d’acquisition qui n’a pas droit, ou seulement de manière partielle, aux avantages d’une convention de double imposition (CDI).
Conséquences
Ce type de montage permet au véhicule suisse de distribuer ensuite des réserves exonérées de l’impôt anticipé à l’investisseur étranger, contournant ainsi les limites du droit au remboursement prévues par la loi et les conventions internationales, ce qui justifie l’intervention de l’AFC au titre de l’abus de droit.
Exemple d’un cas typique de transposition internationale étendue
Par le biais d’une société d’acquisition suisse (Holding suisse), une société étrangère acquiert une société de capitaux suisse (société cible suisse) pour un montant de CHF 100 millions. Pour financer cette opération, la Holding suisse est dotée par la société étrangère de CHF 100 millions, sous forme de réserves issues d’apports en capital (RIAC). La société acquise dispose, quant à elle, de CHF 5 millions de RIAC. Quelques années plus tard, la société suisse verse un dividende de CHF 8 millions à la Holding suisse.
Dans le schéma ci-dessus, la Holding suisse est intégralement financée par la société étrangère via des RIAC, sans recours à un financement externe. Cela permet à la Holding suisse de recevoir des dividendes de la société cible suisse et de les reverser à la société étrangère sans retenue d’impôt anticipé, sous forme de remboursement de RIAC. Or, la société étrangère n’aurait pas eu droit au remboursement si elle avait détenu directement la société cible. L’AFC considère donc que cette structuration contourne la finalité de l’impôt anticipé et porte atteinte au substrat fiscal suisse, ce qui justifie le refus du remboursement sur la base de l’art. 21 al. 2 LIA.
Les effets de la transposition internationale étendue peuvent, dans certains cas, être neutralisés a posteriori, notamment par le reclassement des RIAC en autres réserves imposables.
Structure admise par l’AFC : transfert des RIAC
La holding suisse transfère CHF 95 millions de ses RIAC dans les autres réserves, de sorte que le solde de ses RIAC ne dépasse plus CHF 5 millions (ce qui représente le montant des RIAC). L’AFC accepte alors le remboursement de l’impôt anticipé, car le reclassement des RIAC en autres réserves les rend imposables, éliminant ainsi toute perte de substrat fiscal.
Conclusion
L’AFC redouble de vigilance face aux montages visant à éluder l’impôt anticipé suisse, en s’appuyant notamment sur la notion de transposition internationale étendue pour contrer certaines structures abusives. Face à ces risques, il est crucial pour les entreprises de bien anticiper les conséquences fiscales de leurs structures, notamment dans le cadre d’acquisitions internationales.
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